Les Productions Hôtel-Motel ont été fondées en 2000 pour la production du spectacle Le 4e round, écrit et mis en scène par Philippe Ducros à Espace Libre. Épopée ludique et mystique autour du monde de la boxe, la pièce se passe entre l’Éthiopie et la Turquie et a comme toile de fond le massacre des Arméniens.
Depuis, Hôtel-Motel a produit près d’une dizaine de projets, dont À la maison! créé en 2008 à Lomé, en Afrique de l’Ouest, en coproduction avec le Théâtre du Mantois de France et la Cie 3C du Togo. Ce triptyque a été joué au Togo, au Bénin, en France et en République tchèque. Notre section, Boulevard Sauvé, offre un portrait d’une Amérique violente de faits divers à l’ombre d’Hollywood.
En décembre 2009 à Espace Libre, la compagnie produit L’affiche, une pièce sur les impacts de l’occupation de la Palestine. On y décrit la violence insupportable d’un impossible quotidien. La parole est donnée aux anonymes qui en subissent les impacts des deux côtés du mur. Pour l’écrire, Philippe est allé à six reprises au Proche-Orient, dont trois en Palestine occupée et en Israël. L’affiche a été des cinq finalistes du Grand Prix de littérature dramatique de 2009 en France. Cette production a été lauréate de nombreux prix, dont celui du « Spectacle de l’année 2009-2010 » décerné par l’Association québécoise des critiques de théâtre.
À travers ces projets, Hôtel-Motel a aussi produit trois expositions photo autour de l’univers des spectacles, ainsi qu’une exposition solo, La rupture du jeûne, regroupant des photos du Liban, de la Syrie, d’Israël et de Palestine, présentée à la Maison de la culture Frontenac en 2006. Philippe Ducros a également publié deux carnets de voyages.
Au printemps 2011, en coproduction avec le Festival TransAmériques, Hôtel-Motel présente La porte du non-retour. Au lieu d’un évènement monstre pour les 10 ans de la compagnie, nous avons privilégié un bilan introspectif sur l’impact de ces pèlerinages extrêmes à la base de notre démarche. Ce déambulatoire théâtral et photographique porte sur le rôle de l’industrie minière canadienne dans la guerre en République démocratique du Congo – qui a fait 6 millions de morts –, ce qui en fait le conflit le plus meurtrier depuis 1945. Pour l’écrire, Philippe est monté à bord d’un vol humanitaire de l’ONU vers le cœur de la zone de conflit. Il n’en n’est jamais tout à fait revenu… Ce projet a été repris en France, en Suisse, au Québec et à Ottawa, en plus d’être présenté en programmation officielle du Festival d’Avignon en 2013. Près de 50 semaines de représentations plus tard, La porte du non-retour est toujours en tournée.
En 2012, Hôtel-Motel s’associe à Orange Noyée et Mani Soleymanlou afin de donner voix à un auteur iranien, Nassim Soleimanpour. Ensemble, ils mettent en scène Lapin blanc, lapin rouge à Espace Libre. La pièce tourne autour de la réalité d’artiste sous dictature théocratique. Soleimanpour ne peut quitter le pays et risque sa vie simplement en prenant la parole. Comme métaphore à ce risque de son geste artistique, ce solo est présenté chaque soir par un comédien différent qui prend connaissance du texte devant le public. La pièce évoque donc, à travers le parcours de l’artiste absent, la situation même des Iranien·ne·s.
En 2014, Philippe Ducros met en scène Eden Motel. Le roman sortira la même année. L’histoire raconte l’errance d’un homme noyé dans une dépendance pharmacologique multiple, qui abandonne tout et s’enfuit sur les routes à la recherche d’un sens. Il échoue sur la grève d’un motel d’autoroute. Commence alors un séjour à mi-chemin entre la rédemption et la réhabilitation. On y parle du malaise de l’Amérique, de sa difficulté au bonheur, du contraste entre son opulence et son taux de suicide.
Présenté à Espace Libre en octobre 2015, Bibish de Kinshasa, adapté du roman Samantha à Kinshasa de Marie-Louise Bibish Mumbu, parle une fois encore de la République démocratique du Congo. Ce projet fait écho à La porte du non-retour, célébrant cette fois la vie et la résilience de celles et ceux qui restent debout. Après sa création, le spectacle a été programmé au Carrefour international de théâtre de Québec et a ensuite fait plusieurs escales à travers le Québec et l’Ouest canadien.
En 2017, Philippe Ducros met en scène le texte Dehors de Gilles Poulin-Denis au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui. Une histoire de fratrie qui met en avant le territoire et l’identité, qui se retrouvent ici intimement liés. Face au choc des civilisations qui caractérise notre ère, ces concepts deviennent alors cruciaux.
L’année 2018 est riche puisque la compagnie crée deux spectacles : La cartomancie du territoire, toujours à Espace Libre, et Première neige / First Snow, une coproduction avec le Théâtre PÀP et le National Theatre of Scotland.
La cartomancie du territoire parle de notre rapport aux réserves autochtones et aux réserves naturelles, de la colonisation du territoire et de la pensée. En 2015, Philippe Ducros a entrepris de sillonner le territoire des 11 nations du Québec. Il a voulu voir ces gens en bordure de nos villes, constater leurs conditions de vie, mesurer le déracinement et les ravages de l’endoctrinement. Le texte qui en découle, composé de témoignages et de réflexions intimes et géopolitiques, prend la forme d’un road trip sur la 132 et la 138. Depuis 2018, plus de 50 représentations du spectacle ont été présentées au Québec et en France. La pièce, publiée chez Atelier 10, a été finaliste pour le Prix de la dramaturgie de langue française de la SACD en 2017.
Toujours en 2018, une nouvelle création voit le jour à Édimbourg : Première neige / First Snow. En réponse au référendum écossais de 2014, cette pièce, coécrite par trois auteurs (Davey Anderson, Philippe Ducros et Linda McLean), brasse les notions de souveraineté, qu’elle soit intime, sociale ou territoriale, en questionnant notre capacité commune à l’espoir politique à notre époque. Elle est construite sur les similitudes historiques, les divergences politiques et les parentés interculturelles entre l’Écosse et le Québec. Lauréate du First Fringe Award et en lice pour le Scottish Arts Club Theatre Awards, elle a été présentée au Quat’Sous en février 2019.
Puis, la pandémie.
L’année 2023 voit apparaître deux nouveaux projets : Chambres d’écho, un duo sur les guerres du Moyen-Orient basé sur une correspondance entre Philippe et une actrice syrienne tout au long des horreurs de la guerre, et L’ombre portée, un nouveau déambulatoire théâtral et photographique sur les murs de ségrégation, les frontières et le raz-de-marée migratoire de notre époque. Ces deux pièces sont publiées à L’instant scène.